Le cas de la diphtongaison

Les groupes de deux voyelles

Une diphtongaison est la combinaison d’une voyelle ouverte ou forte (a, e, o) et d’une voyelle fermée ou faible (i, u), de telle sorte que la voyelle faible perde de sa force et serve de support à la voyelle forte, en devenant semi-voyelle ou semi-consonne.

Contrairement au castillan, en catalan, comme en portugais par exemple, la combinaison voyelle faible i + voyelle forte ne forme pas nécessairement une diphtongue, ce qui a des conséquences notables sur l’accentuation écrite. Le mot castillan fa-mi-lia (trois syllabes) se traduit fa--li-a (quatre syllabes) en catalan.

Diphtongues décroissantes

Dans ces combinaisons, le i ou le u, qui occupe une fonction de semi-voyelle, finit la diphtongue ; la bouche se ferme sur cette voyelle fermée : ai, ei, ii (aux Baléares uniquement), oi, ui, au, eu, iu, ou, uu.

l’es-pai (espace) - la rei-na (reine) - co-foi (fier) - el gri-pau (crapaud) - el deu-te [è] (dette) - di-jous [ò] (jeudi) - riu-re (rire) - des-pec-tiu - el riu (fleuve) - al-tiu (hautain) - duu (il porte) - vol-gués-siu (imp. subj. de voler) - el rui-bar-bre (rhubarbe) - bui-dar (vider) - cuit (cuit)

Les exceptions sont nombreuses, marquées alors par un signe distinctif (étudié plus bas). Il s’agit notamment des terminaisons du présent du subjonctif et des terminaisons latines en -us et -um.

es-du-di-ïs (que tu apprennes) - -di-um (médium) - re-du-ït - ru-ï-na [rru-í-n ] - su-ï-ci-di (suicide) - la in-tu-ï-ci-ó (intuition)

Les mots savants en -tat, -al, -itzar ont une diphtongue dans la forme de base.

he-roic [ò] (héroïque) => l’he-ro-ï-ci-tat (héroïsme)

flui-da (fluide) => la flu-ï-de-sa [è] (fluidité)

Diphtongues croissantes

Le i ou le u, qui occupe une fonction de semi-consonne, commence la diphtongue et la bouche s’ouvre vers la voyelle ouverte. Mais cette diphtongaison n’est pas aussi systématique que pour les diphtongues décroissantes : elle se produit seulement en début de mot ou dans le groupe gu / qu, ainsi qu’après une voyelle (voir plus bas la partie consacrée aux groupes de trois voyelles).

hie--tic (hiératique) - el io-gurt (yoghourt) - el io-de [ó] (iode)

la llen-gua [é] (langue) - o-bli-qua (oblique) - quò-rum (quorum)

Dans les autres cas, il n’y a pas diphtongaison et les voyelles i / u suivies d’une voyelle forte sont prononcées distinctement : la història [his-tò-ri- ].

la ca--ci-a (caresse) - l’al·lèr-gi-a (allergie) - la ran--ni-a (rancune) - la ga--xi-a (galaxie) - con-tem-po--ni-a (contemporaine) - la -du-a (veuve) - la intu-ï-ci-ó (intuition) - la -ri-e (série)

L’accent écrit n’est donc pas nécessaire dans les cas suivants.

An-da-lu-si-a (Andalousie) - la loteria (loterie) - confia (il confie) - l’alegria (joie) - els dies (jours) - seria (il serait) - havia (il avait) - continua (il continue ; cast. contia) - du-es (deux) - la su-or [ó] (sueur)

Dans quelques cas, la prononciation est elle-même différente dans les deux langues.

canvia [k m-bí- ] (il change ; cast. cambia) ; anuncia (il annonce ; cast. anuncia)

La rupture de la diphtongue

Quand une diphtongue est prononcée plus fortement, tout en restant unie, c’est la voyelle forte qui porte l’accent, écrit ou non.

la fei-na (travail) - la pre-cau-ci-ó (précaution)

Quand les deux voyelles sont faibles, c’est la première qui porte l’accent (alors qu’en castillan, c’est la deuxième).

la cui-na (cuisine) (cas général) - Llu-ís (accent pour signaler l’exception)

Pour marquer la rupture d’une diphtongue, on emploie un tréma sur la voyelle faible.

a-gra-ït (reconnaissant) - can-vi-ï (qu’il change) - la ru-ï-na (ruine) - el pro-ï-sme (prochain) - la intu-ï-ci-ó (intuition)- je-su-ï-tes (jésuites)

Si les règles de l’accentuation exigent un accent écrit, celui-ci remplace le tréma.

a-gra-í (je remerciai) - el ve-í (voisin) => els ve-ïns ; el ve-ï-nat (voisinage) - el pa-ís = > els pa-ï-sos

En effet, si país portait seulement un tréma, on le prononcerait [pa-is] car l’accent serait sur l’avant-dernière syllabe ; au pluriel, le tréma suffit car la syllabe accentuée est l’avant-dernière (pa-ï-sos).

Il existe cependant des cas où le tréma n’est pas utilisé alors qu’il y a hiatus, avec les suffixes isme et ista, les infinitifs (et futurs et conditionnels puisque formés à partir de l’infinitif), les gérondifs et les préfixes re, co, contra, semi.

e-go-is-me (égoïsme) - al-tru-is-ta (altruiste) - tra-du-int (traduisant) - tra-du-ir (traduire) - tra-du-i- (je traduirai) - re-i-te-rar (réitérer) - co-in-ci-dir (coïncider) - an-ti-im-pe-ri-a-lis-ta (anti-impérialiste) - con-tra-in-di-car [ò-a] (contre-indiquer) - re-u-nir (réunir) (une exception : reeixir => reïxo = je réussis)

Les groupes de trois voyelles

ve-ia (il voyait) - vè-iem (nous voyions) - la no-ia [ò] (jeune fille) - ve-iem (nous voyons) - re-ial (royal) - ca-uen (ils tombent) - la ba-ie-ta [è] (serpillière) - ca-ient (en tombant) - te--eu (vous aviez)

Comme pour la diphtongue, l’accentuation d’une voyelle faible rompt la triphtongue, la voyelle tonique étant signalée soit par un accent, soit par un tréma.

constitu-ï-a (il constituait)

Les vraies triphtongues sont rares.

guaitar (guetter) - hioi-de [ò] (hyoïde - os du cou)